Naître à Henryville et mourir à
Saint-Boniface n’a rien de banal.
Mais s’attaquer
à Wilfrid Laurier quand celui-ci avait décidé d’abandonner les siens aux mains
des Anglais racistes sort encore plus de l’ordinaire.
Né le 15 août
1844, Thomas-Alfred fait son cours classique au séminaire de Saint-Hyacinthe,
haut lieu de l’ultramontanisme,
puis opte pour le droit et le journalisme, ce qui le met en contact avec
Honoré Mercier, lui-même alors clerc d’avocat et journaliste.
Après s’être
constitué une belle clientèle à Saint-Hyacinthe, il décide, en 1880, d’aller
s’installer au Manitoba pour y pratiquer l’agriculture.
Mais, à peine
arrivé et vu sa formation et ses qualités, il est nommé surintendant des écoles
catholiques.
Ceci est loin
d’être une sinécure puisque les Anglais du Manitoba, plus enragés que jamais,
ont décidé d’éradiquer le fait français et catholique de la province et ils ne
reculent devant aucune attaque, tracasserie ou brimade pour arriver à leurs
fins.
Malgré l’appui
de la hiérarchie catholique, Bernier s’épuise à la tâche d’écarter les avanies
les plus sérieuses.
Rien n’y fait
et, en mars 1890, le
gouvernement de Thomas Greenway abolit le double système
d’enseignement public confessionnel et interdit l’usage de la langue française
au Parlement, dans les tribunaux et dans les documents officiels.
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Thomas Greenway |
Par le fait
même, Bernier perdait son emploi.
Jusque là
réfractaire à l’idée de se lancer en politique, il accepte néanmoins, en 1892,
d’entrer au Sénat fédéral.
C’est que la
situation politique est devenue particulièrement agitée, les Canadiens français - du Québec surtout -
exigeant très bruyamment que justice soit rendue à leurs frères et sœurs de
langue et de religion.
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Wilfrid Laurier |
Wilfrid Laurier,
Canadien français d’origine mais parlant le français avec un accent anglais,
est durement pris à partie par les électeurs.
Ceux-ci exigent
qu’il désavoue la loi manitobaine et qu’il restitue les droits que la province
s’était pourtant engagée à respecter en entrant dans la confédération canadienne.
Il est bien
évident que Laurier n’aurait jamais osé s’en prendre à des dictats anglais,
mais la pression était tellement forte qu’il a essayé une manœuvre de
diversion, manœuvre que l’on appelle le compromis Laurier-Greenway.
Le stratagème
permettait l’enseignement d’une langue autre que l’anglais... une demi-heure par
jour, en fin de journée, dans certaines écoles dont la rareté égalait l’ineptie.
6 ans après
l’adoption de la loi inique et inconstitutionnelle, Laurier accouchait de cette
lamentable mascarade.
Pas plus que
bien d’autres, le sénateur Bernier ne s’est pas laissé abuser par cette
tartuferie et il multiplia, tant au Sénat que dans divers journaux, ses
attaques contre ce Laurier capable d’abandonner aussi vilement son propre
peuple.
De Henryville à
Saint-Boniface, Thomas-Alfred Bernier n’avait rien perdu de sa lucidité.
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